Mommy : quels sont les mécanismes des conduites agressives ?

cinematraque

Si vous voulez voir un bon film au cinéma, je vous conseille Mommy, la dernière réalisation de Xavier Dolan actuellement à l’affiche.

Le pitch : les relations entre un adolescent aux comportements provocateurs et violents, sa mère et une voisine surprenante.

C’est l’occasion d’évoquer dans ce post les mécanismes facilitant l’émergence et le maintien des conduites agressives.

Existe-t-il des diagnostics dont les symptômes évoquent ceux du personnage de Steeve, l’adolescent dans le film ?

Il ne s’agit pas de coller un diagnostic au héros de cette histoire. D’autant plus que celui-là n’est pas évoqué dans le film. Il s’agit plutôt de rappeler comment les manuels de psychopathologie et de psychiatrie reconnaissent des comportements perturbateurs, violents, comme étant de l’ordre d’un trouble reconnu.

Les deux grandes classifications internationales des troubles mentaux et du comportement (DSM et CIM) proposent une rubrique de « trouble du comportement perturbateur » observé pendant l’enfance ou l’adolescence. Au sein de cette catégorie, figure notamment le trouble des conduites.

Le trouble des conduites correspond à un « Ensemble de conduites, répétitives et persistantes, dans lequel sont bafoués les droits fondamentaux d'autrui ou les normes et règles sociales ». Pour que le diagnostic soit posé, il faut constater chez la personne, pendant au moins une année, des comportements agressifs envers des personnes ou des animaux, une destruction de biens matériels, des actes de fraude ou de vol, et des violations graves de règles établies (pour plus de détails, vous pouvez consulter le DSM-IV-TR).

Quelles sont les causes d’un trouble du comportement perturbateur ?

Les causes ne sont pas connues et les facteurs de risque apparaissent multiples et de nature diverse. Les spécialistes reconnaissent l’implication de facteurs à la fois génétiques, familiaux et environnementaux, des facteurs liés à des complications obstétricales (asphyxie néonatale par exemple). Également des mécanismes neurobiologiques sous-tendraient les comportements impulsifs et le contrôle des émotions. De plus, d’autres paramètres biologiques pourraient jouer un rôle dans les comportements liés à l’impulsivité et la violence (le cholestérol ou certaines hormones comme la testostérone par exemple). Pour en savoir plus, vous pouvez consulter le rapport de l’Inserm sur le trouble des conduites chez l’enfant et l’adolescent (2005).

Les pratiques éducatives parentales auraient également un rôle à jouer dans l’entretien de certains comportements. Ainsi, bien qu’une pratique éducative ne puisse en aucun cas être la cause du développement d’un trouble du comportement, elles peuvent, dans certains cas, faciliter le maintien d’interactions inadéquates au sein des familles. Comprendre les mécanismes de ces interactions peut permettre aux cliniciens d’aider les familles à mieux gérer les situations conflictuelles. Ce type de soutien fait en général appel aux théories de l’apprentissage.

La psychoéducation

Pour aider les familles dont les enfants présentent des troubles du comportement perturbateur, certains professionnels peuvent proposer des programmes psycho-éducatifs, notamment des programmes d’entraînement aux habiletés parentales (Clément, 2013). Il s’agit d’enseigner aux familles des stratégies d’adaptation et de gestion de comportement tout en les aidant à mieux comprendre pourquoi les interactions conflictuelles se maintiennent. « La psychoéducation implique d’enseigner aux parents les éléments concernant les difficultés que leurs enfants rencontrent, les signes de leurs problématiques spécifiques, et la façon de faire face aux situations difficiles ». Les parents apprennent ainsi à mieux identifier les éléments précurseurs des comportements de leur enfant et leur conséquence (qu’est-ce qu’ils y gagnent ?). Il devient alors plus facile de changer leurs comportements et ceux de leurs enfants.

Un exemple : dans les familles d’adolescents présentant des conduites agressives, on observe de façon plus fréquente la présence d’éléments spécifiques comme les châtiments corporels. Cependant, alors que les fessées ou les gifles ont pour la plupart des enfants une valeur de punition, on constate parfois que pour ces jeunes, les châtiments physiques sont au contraire une forme d’attention donnée par le parent. Le besoin d’attention étant si fondamental, les châtiments donnés par les parents voient leur nombre augmenter et se maintenir, en même temps que les comportements inadaptés émis par le jeune qui a appris que c’était pour lui un moyen efficace d’obtenir de l’attention. Pour les parents, l’enjeu psycho-éducatif consistera alors à les aider à modifier progressivement leurs comportements d’attention, tout en modélisant des comportements plus appropriés chez l’enfant. C’est précisément pour ces nouveaux comportements que seront apportés une forme d’attention plus appropriée.

Source :

Clément, C. (2013). Conditionnement, apprentissage et comportement humain. Paris : Dunod.