Tornade humaine chez Virgin

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Le 13 mai 2013 à 7 h du matin, des clients du Virgin Megastore des Champs-Elysées font déjà la queue devant le magasin. Placée en redressement judiciaire, l’enseigne a décidé de proposer ses produits à - 50 %. À 10 h, le magasin ouvre ses portes…

Il s’agit là d’une situation de groupe où chaque individu présente des comportements très similaires. Un tel effet de foule nous amène souvent à juger le groupe comme si nous jugions un seul individu. Cette perception est le résultat de notre tendance à définir autrui seulement à partir de ses comportements : les 200 individus qui adoptent un même comportement jugé antisocial, deviennent une bande d’antisociaux. Cette catégorisation est pratique puisqu’elle nous aide à percevoir notre environnement de façon plus synthétique. Pourtant, ce jugement est biaisé dans la mesure où nous oublions les caractéristiques plus personnelles de chaque individu du groupe. Ainsi, au départ, ces clients de Virgin n’avaient pas forcément tous la même intention de courir dans le magasin. Chacun est arrivé avec des motivations différentes : untel est peut-être entré chez Virgin sans connaître l’opération de ristourne ; une autre encore, a pu enfin avoir l’occasion d’acheter une console de jeu pour son fils à un prix abordable ; un autre ne voulait rien acheter, mais adore le pogo ; un autre encore a voulu ramener un maximum d’objets numériques pour les revendre sur ebay…

Le problème posé par cette foule serait alors de tenter d’expliquer pourquoi les individus d’un groupe en viennent à se comporter de façon identique. Certaines théories en psychologie sociale nous enseignent que le comportement de personnes réunies dans une foule n’est plus le même que lorsque ces mêmes individus sont isolés. En particulier, ce sont les notions d’imitation et de contagion sociale qui permettent d’expliquer que les comportements ont tendance à s’uniformiser et se calquer sur les comportements majoritaires dans la foule. Ainsi, chez Virgin, les clients ont progressivement ajusté leurs comportements à ceux des autres pour finir par être catégorisés dans un même panier. Ce jour-là, une femme serait même tombée dans l’escalier du hall sans que personne ne l’aide… En psychologie sociale, un tel comportement est nommé « l’effet spectateur » : les personnes sont inhibées dans leur comportement d’aide, car leur responsabilité est partagée par le groupe et donc minimisée. Ainsi, plus la foule est importante, et plus la probabilité d’aide diminue. De plus, on imagine que ce jour-là chez Virgin, le phénomène a été amplifié par l’urgence des enjeux financiers. Cette théorie de « l’effet spectateur » trouve son origine dans l’affaire Kitty Genovese. Dans les années soixante, cette jeune femme a été sexuellement agressée avant d’être assassinée par un homme dans une rue de New York. Les circonstances de son meurtre ont à l’époque marqué l’opinion publique puisque, parmi la trentaine de témoins présents, aucun n’est intervenu. Ce fait divers a d’ailleurs entraîné la création du "911", le numéro d'appel d'urgence.