La petite tuerie du dimanche : le Kouign Amann de Michel Izard

Le Kouingn Amann de Michel Izard ©Matthieu Cellard

Michel Izard est un boulanger au parcours complètement à l’Ouest, c’est lui qui le dit… Ancien chef cuisinier de grand talent, prix Taittinger en 1993, étoilé Michelin à Paris, mais Breton avant tout et doté d’un caractère “finistérien” qui lui fait tourner casaque en 1995 avec l’ouverture de sa boulangerie à Lannilis, où désormais il fait un des meilleurs Kouign Amann du monde !

Quand on vient de recevoir le Taittinger, qui est en cuisine ce que le Goncours est en littérature, quand on obtient une étoile au “Dodin Bouffant”, ancienne et respectable institution de la capitale, on fait partie du gotha de la gastronomie. C’était ce que vivait Michel Izard. Mais voilà, patatras, chez “Dodin Bouffant”, en 1993, on ne voit pas les choses en grand. Les propriétaires décident de la jouer gagne-petit en transformant le restaurant gastronomique en brasserie de luxe, moins prestigieux mais plus rentable… Pour Michel Izard, s’en est trop : “J’ai vécu ça comme une profonde injustice. J’ai décidé de tout arrêter !”

Pains de caractère

Breton dans l’âme, caractère de granit, Michel Izard avait un projet en tête : “Le pain me passionnait. J’en faisais moi-même dans mes restaurants. Je pensais que l’on pouvait renouveler une démarche, que la boulangerie pouvait apporter quelque chose en matière de bien manger. Je m'y suis lancé corps et âme, sans complexes, en me disant que la bonne direction était d’allier la tradition et la recherche.”
Le 13 septembre 1995, la “Maison du boulanger” ouvre ses portes à Lannilis. Les idées sont claires : « Toutes mes farines sont biologiques, souligne Michel Izard. En 1995, la boulangerie n’avait pas fait sa révolution, les farines blanches dominaient le marché, les pains ne se conservaient pas, le mal était profond. Je ne blâme pas les professeurs du CAP de boulangerie, mais il faut reconnaître que l’enseignement n’était pas adapté à la boulangerie du XXIème siècle, je blâme tout un système qui n’a pas su se poser les bonnes questions. ” Caractère bien trempé, je vous le disais…
A la boulangerie, Michel Izard allait appliquer des principes de cuisinier : “La provenance des produits, la saisonnalité étaient des notions absentes, elles sont centrales dans mon travail. ” Il fallait tout remettre à plat.

Le levain pour signature

“La base, explique Michel Izard, c’est le levain. Il faut le faire soi-même, sinon ce n’est pas la peine de faire du pain. C’est la signature du boulanger. C’est comme un fond pour une sauce, cela apporte la base gustative. »
Un travail salué par le Gault & Millau qui place la boulangerie de Michel Izard dans le top 10 français. Aujourd’hui, les pains de Michel Izard sont naturellement plébiscités par toute la Bretagne, depuis la baguette de tradition, en passant par le pain à l’épeautre, la bûche sarrasin, le pain aux algues, le pain aux plancton ou encore le pain des abers, le préféré des marins pour sa capacité de conservation après plusieurs semaines de mer. Il paraît que, dans leurs courses transocéanes, une tranche de pain des abers remonte le moral comme une pendule.
Evidemment, quand un boulanger de la classe de Michal Izard se lance dans la réalisation d’un Kouign Amann, on touche au sublime. Très feuilleté, très croustillant, caramélisé dessus, fondant dedans, léger… Eh oui, léger, c’est possible, même pour un Kouign Amann. Certes, il reste riche, mais sans lourdeur. Et c’est pour ça qu’il sera notre tuerie du dimanche.

Adresses :
La maison du boulanger à :

Lannilis - 
3 rue des Marchands - 02 98 04 48 05
- lundi, mardi, mercredi, vendredi : 6h30 à 13h et de 15 h à 19h15
- samedi : 6h30 à 19h15
- dimanche : 6h30 à 13h et de 14h30 à 19h15 -
Fermeture le jeudi
Brest
 - Halles St Martin - 02 98 33 17 59
du mardi au vendredi : 8h30 - 13h
samedi : 8h15 - 13h. 
Halles St Louis - 02 98 80 03 71
du mardi au vendredi : 8h30 - 13h
samedi : 8h300 - 13h
dimanche : 8h15 - 13h.
Roscoff - 28 rue Gambetta - 02 98 69 77 64
- du lundi au mercredi : 7h30 - 13h / 15h - 19h
fermé le jeudi, vendredi et samedi : 7h30 - 13h / 15h - 19h
dimanche : 7h30 - 13h

Recette

Le Kouign Amann de Michel Izard

Ingrédients et réalisation
Prendre 500 g de fine fleur de farine de froment (bio, si vous pouvez et de type 65), 250 g d’eau, 120 g de levain naturel, 8 g de sel de mer gris, et 20 g de levure de boulanger.
Mélanger l’ensemble au batteur pour mélanger les ingrédients, puis pétrir (au crochet) pendant 10 minutes, laisser reposer 15 minutes à température ambiante, puis mettre à couvert au réfrigérateur pendant une heure.
Prendre 400 g de beurre de baratte demi-sel (ce qui va sans dire va encore mieux en le disant !), l’amener à consistance pommade, et peser 200 g de sucre.
Etaler la pâte (« froide ») en un rectangle de 30 X 20 cm environ, « emmailloter » le beurre dans la pâte, puis à l’aide d’un rouleau abaisser (étaler) à une épaisseur d’environ 2 cm.
Abaisser à nouveau, puis saupoudrer avec la moitié du sucre (200 g) sur le tiers du pâton, recouvrir le sucre avec le second tiers, et renouveler l’opération. Le sucre se trouve « prisonnier » entre les couches de pâte.
Laisser reposer au réfrigérateur environ 30 minutes.
Préparer les moules (tailler à souhait) un moule à manquer (anti adhésif) ira très bien.
Au pinceau, beurrer le moule et déposer avec parcimonie quelques pincées de sucre (pour aider à la caramélisation !)
Découper le pâton à la taille requise, (épaisseur d’environ 3 cm) couvrir d’un torchon, et laisser à l’extérieur (ou à proximité d’une source de chaleur < à 30°C>) après la pousse (action du levain et de la levure) environ 45 à 60 minutes,
Cuire le « gâteau au beurre » à 200°C (Thermostat 7) durant environ 35 à 40 minutes en fonction de la taille !
Un petit beurre peut fondre un soupçon (pas grave, laisser le reposer 3 à 5 minutes, la pâte va “pomper le beurre ”) puis démouler (avant complet refroidissement qui provoquerait un effet de “collage”)
Déguster à température ambiante ou réchauffer à 150°C durant quelques minutes, avec un café, une bolée de cidre ou autre élixir de votre choix mais d’un bon tonneau !
Il doit être doré à souhait, caramélisé d’un blond appétissant, croustillant à l’extérieur et moelleux à l’intérieur, savoureux dans son ensemble, sucré mais pas trop, avec des arômes de beurre noisette…
Apprécier à sa juste valeur, mais souvenez-vous que c’est la dose qui fait le poison, dixit Paracelse.