La petite tuerie du dimanche : l’œuf meurette de Saulieu en trois générations…

Les œufs en meurette de Louis-Philippe Vigilant © Matthieu Cellard

L’œuf meurette ne pouvait éclore ailleurs qu’au milieu des vignes. Celles qui tissèrent son nid étaient bourguignonnes. Plat pauvre, par l’association d’ingrédients modestes, mais somptueux par sa profonde gourmandise, la meurette fait appel au garde-manger paysan pour les éléments qui la constituent : vin rouge, beurre, lardons, échalotes.
S’il est dans l’histoire de grands noms de petite extraction, jamais l’œuf meurette ne pourra être regardé comme un nouveau riche de la cuisine française… On peut lui donner par petites touches quelques attributs de séduction dans l’air du temps, mais on ne peut pas maquiller la simplicité native de cette recette.
Bernard Loiseau, maître de Saulieu en Bourgogne, avait dans les années 80/90 apporté son tour de main à l’ancestrale façon de réaliser un œuf poché en meurette. On sait la volonté du chef du restaurant “La côte d’Or” d’alléger les sauces, de laisser au placard le beurre, la crème fraîche et la farine, or la liaison de la sauce meurette est traditionnellement au beurre et à la farine. Il lui fallait trouver autre chose. Il appliquera aux œufs meurette la liaison de la sauce au vin rouge qui accompagnait son célèbre pavé de sandre aux échalotes confites : sa réduction était liée à l’aide d’une purée de carotte. Il ajoutait à l’ensemble une compotée d’oignons.
Quelques années plus tard, Patrick Bertron, fidèle second de Bernard Loiseau, aujourd’hui brillamment et pourtant discrètement chef triple étoilé de la brigade de Saulieu, donne à son tour une version de la recette. Il revient à une liaison classique, mais supprime les lardons au profit de tranches de jambon du proche Morvan, qu’il fait frire pour les rendre croustillantes. Il apporte ainsi un jeu nouveau sur les textures, le moelleux et le croquant.
Enfin, c’est à Louis-Philippe Vigilant que nous avons demandé son regard sur l’œuf meurette. Louis-Philippe Vigilant est la dernière pousse de la pépinière Loiseau. Il a été formé par Patrick Bertron et veille aujourd’hui aux destinés de “Loiseau des Ducs”, le restaurant ouvert cet été par la famille Loiseau.
Louis-Philippe s’appuie indéniablement sur les approches de ces deux grands maîtres en cuisine. Il garde la compote d’oignon que réalisait Bernard Loiseau et sur laquelle le chef de Saulieu posait l’œuf poché avant de couler tout autour la meurette, mais il fait moitié-moitié avec des échalotes, sans doute pour donner un caractère un peu plus poivré à cette compotée. Il reprend aussi le jeu des textures en déposant sur sa composition finale de fines tranches de lard grillé et non pas de jambon, ainsi que quelques fines chips d’échalotes. Hardiment et subtilement, il verse un trait de jus de cassis (ce qui est diablement bourguignon dans l’esprit) dans le vin qui servira à la réduction. Comme Patrick Bertron, il ne lie pas la sauce à la purée de carotte, mais il utilise de la fécule de pomme de terre pour garder de la légèreté. Enfin, il nous donne un petit truc pour ne pas rater le pochage des œufs. Prévenante, la jeune génération…

Adresses :
Loiseau des Ducs - 3 rue Vauban - 21000 DIJON - Tel : 03 80 30 28 09
Horaires : de 12h00 à 13h30 et de 19h30 à 22h30.
Fermeture hebdomadaire : dimanche et lundi.

Fermeture annuelle : du 25 février au 10 mars 2014 inclus.

Relais Bernard Loiseau - 21210 SAULIEU - Tel : 03 80 90 53 53

FERMETURE ANNUELLE
 : du 21 janvier au 27 février 2014
. Réouverture le 28 février à partir de 15h.

FERMETURE HEBDOMADAIRE
: tous les mardis et les mercredis.



La recette des œufs en meurette de Louis-Philippe Vigilant

Pour 2 personnes

Oeuf
4 oeufs plein extra frais
50 cl de vinaigre blanc
Une grande sauteuse d’eau chaude

Compotée d’oignon et échalote.
250 g d’oigons blancs
250 g de grosses échalotes
40 g de beurre
15g de sucre
5g de sel
Poivre du moulin qs

Sauce vin rouge
60 cl litre de vin rouge (syrah)
10 cl de jus de cassis
70 g de beurre doux
5g de sucre
2 g de fécule de pomme de terre
Sel qs
Poivre du moulin qs

Sauce vin rouge
Dans une casserole, mettre à réduire à feu doux les 60 cl de vin rouge jusqu’à obtenir 6 cl de vin réduit.
Délayez les 2 g de fécule dans le jus de cassis, et incorporer au vin rouge réduit.
Fouettez doucement et montez la sauce au beurre en incorporant le beurre en petits cubes.
Assaisonner avec le sel, sucre et poivre du moulin selon votre goût.
Le jus de cassis rend la sauce brillante et d’un beau rouge pourpre.
La fécule évite à votre sauce de trancher, c'est à dire de mal se lier.
Réserver au chaud.

Compotée d’oignons et d’échalotes
Épluchez, émincez finement les oignons et les échalotes.
Ou sinon utilisez une mandoline pour avoir un meilleur résultat (attention à vos doigts !).
Rincez-les à l’eau froide puis égouttez.
Dans une cocotte, faites-les revenir au beurre doucement.
Mélangez régulièrement afin que ceux ci n’accrochent pas au fond du récipient.
Faire compoter jusqu'à ce que les oignons et les échalotes brunissent, une belle coloration dorée voir bronze.
Assaisonner avec le sucre, le sel et le poivre.
La compotée d’oignons et d'échalotes doit être fondante, elle doit développer des arômes de caramel au beurre.
Réserver au chaud.

Œuf
Portez à ébullition l’eau dans la sauteuse, rajoutez 30 cl de vinaigre blanc.
Pendant ce temps, casser les œufs un à un dans des tasses à café, puis couvrir avec les 20 cl de vinaigre restants à répartir (4 tasses pour 4 œufs).
Le vinaigre va précuire l’extérieur de l’œuf. La membrane qui se crée facilite le pochage.
Laisser ainsi 3 min. Puis pocher vos œufs un à un dans la sauteuse d’eau chaude.
Donner un léger mouvement circulaire avec une cuillère dans l’eau de la sauteuse afin de créer un tourbillon ce qui permettra au blanc de l’œuf de bien envelopper le jaune et d’avoir ainsi un bel œuf poché.
Laissez cuire 2 min à frémissement, puis récupérez l’œuf à l’aide d’une écumoire.
Stopper la cuisson des œufs en les plongeant dans un bol d’eau fraiche, ceci permettra également d’enlever l’excédent de vinaigre.
Au moment de servir, replonger les œufs dans une eau frémissante pour les réchauffer.

Dressage
Dans 2 assiettes creuses, déposer un nid de compotée d’oignons et d’échalotes caramélisés.
Puis disposez 2 œufs préalablement réchauffés dans chaque assiette.
Nappez de sauce vin rouge bien chaude.
Faire une légère incision sur chaque œuf pour en laisser sortir un peu de jaune coulant.
Parsemez d’un peu de fleur de sel, poivre du moulin.

Conseil
Ici nous réalisons des chips d’échalotes et de lard, que vous pouvez faire chez vous à la poêle ou au four. Ceci apportera du croustillant à votre recette.
Ou même toaster des tranches de baguette que vous recouvrez de compotée d’oignons et d’échalotes.
Vous pouvez également décorer vos assiettes avec des pousses de roquette ou d’épinard et de quelques fleurs.