Le bouc émissaire

L'Italie est une terre d'accueil.
Les images de migrants secourus par sa marine, ses gardes côtes et tout ce que la péninsule compte de bateaux naviguant dans le canal de Sicile en sont la preuve.
L'opération Mare Nostrum lancée à l'automne 2013 après deux terribles naufrages à Lampedusa et au large de Malte a permis tout au long de l'année 2014 de secourir près de 100 000 migrants.
140 000 en tout ont rallié la terre italienne cette année.
140 000 en 2014, 40 000 l'année d'avant et ainsi de suite depuis les printemps arabes sans jamais provoquer de véritables tensions.
Toujours l'Italie s'est montrée accueillante.
En Sicile tel port s'est toujours mobilisé, telle église a toujours hébergé, telle famille a même adopté un jeune migrant mineur.
Mais voilà un jour tout a dérapé.
C'était le 12 novembre à Tor Sapienza, banlieue résidentielle de Rome.
A Tor Sapienza il y a un centre d'accueil pour migrant.
Rien à voir avec Mineo en Sicile et ses milliers de réfugiés.
Tor Sapienza c'était une 50aine de migrants dans un immeuble ni plus beau ni plus laid que les autres.
Pourtant le 12 novembre les habitants du quartier y ont donné l'assaut.
Volonté délibérée de lyncher ses occupants.
Malaise social qui a force d'être intériorisé a fini par exploser.
Parce que l'Italie est en crise. La santé, l'éducation, les allocations chômage, tout ce qu'on appelle les aides sociales sont inexistants ou en piteux état.
Avec 45% des moins de 25 ans sans emploi et 6 millions de chômeurs en tout.
100 000 diplômés qui ont fait leur valise en 2013 pour chercher un avenir meilleur dans un autre pays.
Peut-être 150 000 oubliés des retraites aussi et des millions qui ne touchent qu'une poignée d'euros chaque mois.
Cela fait beaucoup de laissés pour compte.
Et à ce jeu là, un migrant accueilli est vu comme un privilégié par une population aux abois.
Ca ne justifie pas l'injustifiable mais ca l'explique.