Mort de Jayalalithaa, demi-dieu de la politique indienne

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Jayalalithaa Jayram, femme politique emblématique indienne, est morte hier soir à l'âge de 68 ans. Elle dirigeait, depuis le début des années 1990, l'État du Tamil Nadu dans le sud de l'Inde. Cette ancienne vedette de cinéma faisait l'objet d'un impressionnant culte de la personnalité dans son pays. L'annonce de sa mort fait craindre des débordements de la part de ses plus fervents partisans. L'État du Tamil Nadu s'est mis en état d'alerte.

"Jayalalithaa n'est plus" ou "La fin d'une ère, Jaya est morte", le décès de la dirigeante indienne occupe la première page de tous les journaux locaux. Sur les chaînes de télévision indienne, les images de son corps dans un cercueil ouvert, enveloppé dans un drapeau indien, tournent en boucle. Le Premier ministre indien, Narendra Modi, s'est déplacé pour lui rendre un dernier hommage, en personne. L'Inde est en deuil. Le pays vient de perdre l'une des figures de proue de la politique indienne. Surnommée Amma, "mère" en tamoul, elle faisait l'objet d'une véritable adoration, presque élevée au rang de divinité par ses plus fidèles partisans.

Scènes de désolation, l'État en état d'alerte

Depuis son hospitalisation, en septembre dernier, une centaine de fidèles veillait déjà devant son hôpital, jour et nuit, sans relâche. Hier soir, une foule de plusieurs milliers de personnes est venue témoigner son soutien. A la confirmation du décès, les marques d'amour ont laissé place à des scènes de désolation. Les chaînes de télévision locales ne montrent que des visages d'hommes et de femmes en pleurs. Du côté des officiels, cette ferveur inquiète. Ils gardent en mémoire les scènes de mutilations et les suicides de ses fanatiques provoquées par son arrestation pour corruption en 2014. Par crainte de violence, le Tamil Nadu, a été mis en état d'alerte. Plus de 6000 policiers ont été mobilisés pour maintenir l'ordre et prévenir des émeutes.

De la star de cinéma... à l'icône politique controversée

"La Dame de fer de l'Inde" a un parcours de vie atypique. Avant d'être une icône politique, elle était une star du septième art indien, avec plus de 140 films à son actif. Elle s'est lancée en politique dans les années 1980 au sein du parti AIADMK (troisième parti du Parlement indien), avant d'être élue Première ministre du Tamil Nadu en 1991. Elle sera réélue à quatre reprises, des mandats régulièrement interrompus pour des affaires de corruption. Incarcérée en 2014, elle faisait l'objet de nombreuses accusations de mensonge, corruption et autoritarisme. Une politique controversée qui n'avait pas pour autant entaché sa popularité. Le journal The Hindustan Times pointe du doigt les "tendances dictatoriales" de la femme politique aussi bien "redoutée que vénérée" . Selon le quotidien indien, elle était l'une des femmes "les plus puissantes d'Inde".

Lucille Guenier