Harcelées, quatre athlètes indiennes choisissent de mourir

La police au SAI, où les jeunes filles vivaient.

Harcèlement sexuel ou moral, exploitation pure et simple, punitions disproportionnées... De nombreuses jeunes athlètes indiennes pourraient être victimes de mauvais traitement, sans jamais oser en parler. Mercredi 6 mai, quatre jeunes kayakistes âgées de 15 ans à 17 ans ont organisé leur suicide collectif. L'une est décédée, les trois autres se trouvent encore dans un état grave.

Avant d'avoir ingurgité un fruit empoisonné dans la chambre où elles vivaient au sein du Sport Authority Of India Center (SAI) d'Alappuzha, dans le sud-ouest du pays, les quatre jeunes filles ont laissé une lettre. Un mot signé de toutes, dans lequel elles indiquent s'être faites lourdement réprimander par leur entraineur, pour une "faute idiote". La famille des jeunes filles n'a pas tardé à ajouter qu'elles subissaient de mauvais traitements au quotidien, ce que dément le SAI. L'une d'elles, âgée de 17 ans, est décédée jeudi peu après son arrivée à l'hôpital. Les trois autres sont actuellement entre la vie et la mort, et les médecins ont du implanter des pacemakers à deux d'entre elles. La police, qui a ouvert une enquête, devra déterminer les causes de cet acte.

Une situation qui renvoie à la Une les conditions de traitement des jeunes athlètes féminines en Inde : de nombreux cas de harcèlement ont été révélés depuis ces dernières années, comme si les victimes osaient enfin sortir de leur silence.

En janvier dernier, une vidéo avait fait le tour de la toile. Filmé par la caméra de surveillance d'un hôtel, on y voit un entraineur de tennis de table trainer de force l'une de ses joueuses dans sa chambre. Il était en voyage avec les 16 membres de son équipe pour participer à un championnat junior.

D'autres entraîneurs ont également été mis en cause récemment. En septembre, une jeune gymnaste a porté plainte contre son coach pour avoir subi des gestes et des paroles déplacées. En février 2014, plusieurs élèves d'un centre d'entrainement ont accusé leur entraineur d'attouchement, et d'avoir tenté de les embrasser sans leur consentement.

La plus grosse affaire de ce type remonte à 2010, lorsque 31 membres de l'équipe nationale de hockey ont collectivement accusé leur coach, le médaillé olympique MK Kaushik, de harcèlement sexuel. Alors démis de ses fonctions, l'homme a été par la suite reconnu coupable des accusations portées contre lui.

Mais il ne s'agit pas toujours d'agressions sexuelles : les jeunes sportives peuvent être la cible de toutes sortes de mauvais traitements. " Dans les centres de formation, les filles sont parfois traitées comme des cobayes, voire comme des domestiques. J'en ai vu plusieurs à qui l'on obligeait de laver les vêtements de leur entraineur, de servir les repas..." confiait à la presse indienne Sunita Godara, ancienne championne de marathon.

Dans le pays où les conditions de vie des femmes ne sont pas idéales, il semble que les sportives de haut niveau ne fassent pas exception.

Cyrielle Granier (st)