Israël va-t-il “sauver le soldat Azaria”?

 

Reconnu coupable d’homicide sur un assaillant palestinien, le sergent Elor Azaria risque jusqu’à vingt ans de prison. Son cas continue de diviser la société israélienne et certaines figures politiques, à l’instar du Premier ministre Benyamin Netanyahou, appellent à une grâce.

Mercredi matin, acclamé par ses proches, tel un héros, Elor Azaria fait son apparition dans la salle d’audience du tribunal militaire de Tel Aviv, à la Kyria, siège de l’armée israélienne et du ministère de la défense. Le soldat, en uniforme, est tout sourire. Quelques heures plus tard, son clan affichait une mine décomposée à l’annonce du jugement. Dehors, ses partisans, dépités et en colère, décidaient d'en découdre avec les forces de l’ordre.
Dix mois après sa mise en détention provisoire, le sergent Elor Azaria, membre d’une unité combattante de l’armée israélienne, a été reconnu coupable d’avoir froidement exécuté un Palestinien, Abed al-Shariff, auteur d’une attaque au couteau contre des soldats, à Hébron. Les juges n’ont pas retenu l’argument de « légitime défense » et de « menace » posé l’assaillant alors que celui-ci était à terre, avancé par les avocats d’Azaria pour expliquer son geste.
Le sergent a donc agi de son propre chef, par vengeance, en tirant une balle dans la tête du Palestinien, quinze minutes après l’incident au cours duquel l’assaillant a grièvement blessé un militaire avant d’être atteint par les tirs d’autres soldats. La présidente de la cour, Maya Heller, a également retenu les témoignages selon lesquels le soldat avait déclaré à ses camarades que le Palestinien méritait de mourir.
Verdict attendu le 15 janvier
Survenue au plus fort de l’«Intifada des couteaux», l’affaire Azaria continue de profondément diviser les Israéliens, entre ceux qui plaident pour le respect par l’armée de valeurs éthiques, notamment l’élite militaire, et ceux qui invoquent le devoir de soutenir sans réserve des soldats constamment confrontés aux attaques palestiniennes.
La polémique autour du procès Azaria a également été alimentée par certaines déclarations fracassantes d’hommes politiques de droite, hostiles à l’état-major, auxquels il a été reproché d’affaiblir l’institution militaire et la motivation des troupes. Ce sont en partie ces voix qui appellent aujourd’hui à une grâce, à défaut de pouvoir compter sur la clémence des juges.
La surprise est venue du Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, qui a exprimé le souhait que le soldat bénéficie d’une grâce. Un recours en ce sens a déjà été présenté au Président de l’Etat, Reuven Rivlin, par la députée Likoud et ministre de la Culture, Miri Regev, considérée par ailleurs comme une proche du chef du gouvernement israélien.
Les Palestiniens espèrent une sentence lourde à l’encontre du soldat israélien. La famille al-Shariff tente pour sa part d’accentuer la pression sur les responsables de l’Etat hébreu en prenant un possible recours à la Cour pénale internationale (CPI) contre Elor Azaria et en appelant à la destruction de la maison de ses proches. Une mesure appliquée généralement aux proches de Palestiniens auteurs d’attaques meurtrières contre des militaires ou des civils israéliens.