Brexit, démission(s), violence : que se passe-t-il en Irlande du Nord ?

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Démission du vice-Premier ministre républicain Martin McGuinness, vacance du pouvoir, policier blessé par balles à Belfast par un « dissident républicain », le contexte politique en Irlande du Nord vacille depuis le vote du Brexit. Mais pourquoi ?

Quel est le statut de l'Irlande du Nord ?

L'Irlande du Nord est un des quatre pays faisant partie du Royaume-Uni avec l'Angleterre, l’Écosse et le Pays de Galles. Bien distinct de la République d'Irlande - ou Irlande du Sud -, sa situation est la cause d'un conflit entre les Républicains nationalistes et catholiques, partisans de l’indépendance de l’Irlande du Nord, et les Loyalistes unionistes et protestants, favorables au maintien de leur région dans le Royaume-Uni.

Après trente ans de « troubles », devenus une campagne essentiellement paramilitaire contre l’État britannique, c'est en 1998 que l'Irlande du Nord retrouve la paix à la suite de la signature des accords du Vendredi Saint. Ces accords prévoient un partage du pouvoir local entre un Premier ministre et un vice-Premier ministre devant appartenir chacun à un des deux partis. L'un est obligatoirement  Républicain - donc pro-nationaliste et pro-catholique - et l'autre Loyaliste - donc pro-britannique et pro-protestant -, à tel point que la défection de l'un des deux doit entraîner la démission forcée de l'autre.

Mais le vote du Brexit vient troubler cette stabilité, et pour cause, 56% des Irlandais du Nord ont voté en faveur du maintien du Royaume-Uni dans l'Union Européenne.

Pourquoi le vice-premier ministre a-t-il démissionné ?

Martin McGuinness partageait le pouvoir avec la Première ministre loyaliste, Arlene Foster. Il a justifié sa démission comme étant une réaction au refus de celle-ci de quitter le pouvoir, ce qui aurait facilité une enquête impliquant Madame Foster personnellement.

Elle serait responsable d’un manque à gagner de 400 millions de livres (460 millions d’euros) pour les finances publiques dans le cadre d’un programme de subventions pour le développement des énergies renouvelables, qu’elle a mené en 2012 alors qu’elle était ministre des entreprises. L'enquête devra déterminer s'il y a fraude ou pas.

Pourtant, cette justification laisse à croire qu’il ne s’agit en réalité que d’un bon prétexte précipitant la tenue de nouvelles élections.

Pourquoi de nouvelles élections ?

Dans le cas de la démission de Martin McGuinness, le Sinn Fein - parti républicain - a refusé de lui nommer un successeur, forçant la première ministre unioniste et pro-britannique, Arlene Foster, à quitter ses fonctions, comme le prévoit les accords de 1998.

Le ministre britannique chargé de l’Irlande du Nord, James Brokenshire, a donc confirmé la vacance du pouvoir nord-irlandais, et a déclaré que des élections législatives anticipées se tiendraient le 2 mars.

Ces élections permettraient  à l'opinion publique d'exprimer son soutien à l'un des deux camps et de se positionner ainsi sur la question du Brexit, les Républicains ayant fait campagne pour le « Remain », et les Loyalistes pour le « Leave ».

Qu’est-ce que cette situation implique ?

Le vote du Brexit, essentiellement anglais et gallois, ravive un sentiment de domination des frontières britanniques sur la voix du peuple nord-irlandais et fait donc ressurgir la question de la réunification de l’Irlande.

Alors que la majorité de la population nord-irlandaise était visiblement opposée au Brexit, on suppose que le Sinn Fein entend bien gagner le prochain scrutin prévu le 2 mars, ce qui positionnerait l’opinion publique sur l’avenir de l’Irlande du Nord.

Enfin, cette situation pourrait ébranler la paix politique signée en 1998. Dimanche soir, un policier nord-irlandais a été blessé par balles, dans ce que les autorités ont appelé une « attaque terroriste ». Comme le rapporte le journal SkyNews, cette fusillade alimente les craintes que des « terroristes dissidents républicains veuillent tirer profit de la crise politique en Irlande du Nord »

Marine Clerc avec Loïc De la Mornais