À 94 ans, il assiste à ses 19ème Jeux Olympiques

Harry à l'aéroport de Rio, il a 2 jours

On le sait, les Jeux Olympiques sont synonymes de record. Records de vitesse, records de force, records de hauteur ou d'équilibre … La liste est longue. Harry Nelson, lui, détient un record un peu particulier, moins sportif, mais tout aussi impressionnant. Agé de 94 ans, cet américain s'apprête à assister aux Jeux Olympiques … pour la 19ème fois.

84 ans de Jeux Olympiques 

Melbourne, Montreal, Mexico, Barcelone, Sydney… Toutes ces villes, Harry les a connues le temps d'un été. Il a assisté à ses premiers JO en 1932, à Los Angeles, à seulement 10 ans. A l'époque, sa famille traverse une période financière difficile. Un matin, alors que sa mère feuillète le journal, elle tombe sur une annonce prometteuse. Un docteur de la région offre une centaine de billets pour assister à un grand évènement : les Jeux Olympiques. "Je n'avais aucune idée de ce que c'était", raconte Harry. "C'était quelque chose de totalement nouveau pour moi".

L'année 1932 marque alors le début d'une grande histoire d'amour. Pourquoi une telle passion ? "Des individus avec d'incroyables talents se retrouvent. Des gens viennent de partout pour les voir, pour profiter, s'amuser. Je trouve ça merveilleux". Pourtant, à l'origine, rien de planifié. Issu d'un milieu social plutôt modeste, Harry n'aurait jamais pensé avoir la chance de réaliser de tels voyages.  Mais cela fait désormais 84 ans qu'il s'envole aux quatre coins du globe, dans le sillage de la flamme olympique. "J'ai eu l'occasion de découvrir le monde", confirme-t-il.

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Harry avec sa femme Dee et Joseph Romanos, un journaliste sportif que le couple a rencontré aux Jeux de Séoul (1988) et retrouve désormais à chaque JO. Ils se revoient cette année à Rio.

Une rencontre improbable aux Jeux de Melbourne 

Quand on lui demande quel est son meilleur souvenir, Harry se met à rire. Des souvenirs, il en a plein la tête. Il a même écrit un livre ! Mais l'édition de 1956, à Melbourne, garde pour lui une saveur particulière. "Avec ma femme, on s'était mariés l'année précédente. C'était notre lune de miel, en quelques sortes". Les JO de 1956, ce sont aussi ceux d'une jolie rencontre avec le sprinter Jesse Owens, multi-médaillé. Un épisode que Harry raconte avec beaucoup d'émotion et une profusion de détails. "J'étais à une réception-cocktail où il y avait des gens importants. Un homme, en particulier, était entouré par la foule. C'était Jesse Owens. Beaucoup de monde lui parlait, je voyais qu'il en avait marre. Mais je me disais : "tu dois aller lui parler, tu dois y aller". Alors, je me suis avancé, je me suis excusé auprès des autres invités et j'ai demandé à lui toucher quelques mots en privé". Mais l'histoire ne s'arrête pas là. Harry n'est pas un admirateur passionné parmi d'autres. Lui, il a un lien particulier avec Jesse Owens."Il avait couru le 4 x 100 mètres avec l'un de mes anciens camarades de classe. On en a discuté, c'était une conversation vraiment amusante".

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De Munich à Moscou, des Jeux sous tensions 

Des souvenirs moins agréables, Harry en a aussi. Il évoque notamment les Jeux de Munich (1972), marqués par les attentats contre Israël. "C'était horrible. La fille de l'un de mes amis participait à l'épreuve du saut à la perche" raconte-t-il avec tristesse. Un autre souvenir sombre : l'année de 1980, celle des Jeux de Moscou. En pleine Guerre-Froide, Harry reçoit une lettre du Président de la République américain lui demandant de ne pas se rendre en Russie. "J'ai trouvé cette lettre si stupide que je l'ai déchirée. J'étais vraiment énervé". Survolté mais motivé, Harry brave les interdictions politiques et se rend à Moscou. Il est l'un des seuls américains présents sur le sol russe.

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Un fan d'athlétisme à Rio 

Comme tout supporter passionné, Harry a une discipline favorite : l'athlétisme. Avec, en tête, les relais, "surtout quand les Etats-Unis gagnent". Pourtant, le nonagénaire confie avoir développé un intérêt grandissant pour l'épreuve du marathon. "Avant, quand je regardais le 10 000 mètres, j'allais prendre quelque chose à boire, j'attendais que ça passe. Mais récemment, les athlètes Nord-Africains ont été incroyables. Maintenant, il y a beaucoup de suspens. On ne sait jamais qui va gagner, il faut regarder la course".

Pour sa 19ème édition olympique, Harry ne fera pas exception à la règle. A Rio, il assistera aux épreuves de relais. Une idée qui l'enthousiasme … mais sans plus. "Avant, j'avais des contacts avec quelques athlètes. Maintenant, je ne connais plus personne, je suis un peu en-dehors du circuit". Pas d'attentes particulières, donc. Mais du fair-play et un esprit sportif. "J'espère simplement que chacun fera de son mieux et que les meilleurs recevront les médailles".

Harry à l'aéroport de Rio, il a 2 jours

Harry à l'aéroport de Rio, il a 2 jours

Arrivé sur le sol brésilien il y a deux jours, Harry a à peine eu le temps de poser ses valises et de découvrir Rio. Une ville qu'il connaît déjà un peu, puisqu'il s'y est rendu en 2003. "Je serai un peu comme à la maison", s'amuse-t-il. Harry plaisante, mais, au fond, sa remarque sonne plutôt juste. Après plus de 80 ans de JO, c'est comme s'il était chez lui un peu partout.

Marie Gentric pour Fanny Lothaire

Photos : archives personnelles