Dossier cannabis de l'Express

 

Je n'ai pas d'intérêts commerciaux avec cet hebdomadaire mais je conseille fortement toute personne intéressée par ce sujet d'acheter celui de cette semaine.

Le dossier est riche, varié, complet, avec les positionnements divers de grands noms de l'addictologie : le Pr Michel LEJOYEUX, les Drs Marc VALLEUR, William LOWENSTEIN, entres autres, ainsi que, pour le clôturer, un débat très intéressant sur la dépénalisation entre Etienne APAIRE, Magistrat, ex-Conseiller de Nicolas SARKOZY au Ministère de l'Intérieur, et Stéphane GATIGNON, Maire, (Europe Ecologie), de Sevran en Seine-Saint-Denis. Le synthétiser serait dommage et je vous incite fortement à le lire.

Je voudrais juste m'arrêter sur la forme. Le titre "Ravages chez les jeunes, CANNABIS, le cri d'alarme des psys" est particulièrement inquiétant. L'image de couverture nous présente Marcel RUFFO, Pédo-Psychiatre, coudes plantés dans la table, doigts croisés, et surtout, regard noir et inquisiteur... ! Il me fait penser à un de mes vieux instituteurs de collège qui, agacé par mes mauvaises notes, m'aurait convoqué dans son bureau pour y recevoir une belle "avoiné" ! "Même pas peur !" aurait certainement dit l'ado que j'étais à l'époque !

Trêve de plaisanterie : cette mise en scène journalistique alarmiste n'a, à mon sens, que pour seul intérêt une politique marketing destinée à faire vendre. Mais cette forme n'est ni anodine, ni dénuée d'effets. Plus nous allons, nous adultes et plus encore les médias, évoquer le cannabis, (et les autres drogues d'ailleurs), sous un aspect exagérément affolant, plus le message que nous souhaitons faire passer, sera contre productif. Plus nous appuierons sur la dangerosité du produit et plus encore sur son caractère illicite, plus l'adolescent aura envie de transgresser cet interdit. Comme le dit M. RUFFO, "c'est le métier des adolescents de transgresser...!"

Ensuite, continuer à parler du cannabis comme d'une drogue douce tel qu'il l'est fait dans ce dossier, me parait d'un autre âge. Arrêtons avec ces notions de produits doux ou....durs ! Aucun d'entre eux ne peut se prévaloir d'un tel qualificatif.  D'autant plus dans un dossier de presse où interviennent, comme je l'ai précisé plus haut, tant d'addictologues de renom... L'alcool serait, lui-même, si cette classification était d'actualité, une drogue DURE ! Peut-être devrions-nous plutôt parler de fragilités individuelles envers tel ou tel toxique qui entraîneraient une dépendance et ses conséquences dramatiques tant sur un plan sanitaire, familial, social, professionnel...

A ce titre, lire dans le dossier : "ce ne sont pas les adultes assez grands pour se discipliner qui inquiètent les spécialistes mais les jeunes..." est très surprenant : si la vulnérabilité individuelle était en lien avec la maturité intellectuelle, il y a bien longtemps que nous aurions trouvé les clefs pour sortir ces adultes enchaînés à leurs produits.

Voilà, si ce n'est ces quelques bémols que je m'autorise à relever, allez-y, très bon dossier à lire....