"Lone Ranger" : Hans Zimmer était-il obligé de plagier "Il était une fois dans l'Ouest" ?

On reconnaît le thème originel à deux reprises, sinon plus, dans le film. Lone Ranger, le nouveau Gore Verbinski-Johnny Depp, n'est pas qu'un hommage à la série télé américaine du même nom (et dont, pour être honnête, je n'avais jamais entendu parler). C'est aussi un clin d'œil au genre "western" en général. La Prisonnière du désert, L'Homme qui tua Liberty Valance, La Horde sauvage... Parmi ces références, énumérées par Les Inrocks, trône Il était une fois dans l'Ouest, de Sergio Leone. Deux grands thèmes identiques (l'avènement du chemin de fer, la vengeance d'un frère) et une musique similaire, puisque l'auteur de la BO de Lone Ranger, Hans Zimmer, reprend le thème créé par Ennio Morricone et le revisite à sa sauce.

Je ne pense pas être la seule à chérir Il était une fois dans l'Ouest. Dans mon cas, "chérir" est même un euphémisme, je vénère ce film. Sans doute parce que je l'ai découvert toute petite. A peine âgée de 10 ans, je regardais un film de plus de 3 heures pour la première fois, totalement fascinée. Je me souviens de la cassette vidéo sur laquelle mes parents avaient enregistré ce western, de son titre fragilement inscrit sur la tranche frontale, au crayon à papier. A force de faire "retour rapide" durant la scène finale de duel entre Charles Bronson et Henry Fonda, sur fond d'harmonica, de rire visqueux et de pendaison, j'avais fini par abîmer la bande. Plus possible de regarder le passage, cassette condamnée. Alors j'écoutais le morceau de musique en CD, et je fermais les yeux. Je rejouais l'épilogue dans ma tête. A la fin, je repartais sur un cheval aux côtés de Charles Bronson. Et le Cheyenne ne mourait pas.

Gros sabots

Cette scène qui m'a tant fait pleurer, baigne dans une ambiance musicale extraordinaire. Pourquoi Hans Zimmer se l'est-il réappropriée ? Que viennent faire ces notes déchirantes dans un western lourdingue et surtout, en rien tragique ? Car Hans Zimmer n'a pas vraiment la subtilité d'une dentellière, lorsqu'il compose. Dans l'interminable chevauchée finale à dos de train, ses accords de mastodonte s'engouffrent à toute blinde dans les gros sabots de Lone Ranger. Une fois remixée, l'envolée lyrique du thème central d'Il était une fois dans l'Ouest ressemble plus à un jingle de fête foraine. Tout juste de quoi servir pour une attraction Disney -le studio a coproduit le film.

Comme si cela ne suffisait pas, dans la même scène, Hans Zimmer plagie à un autre grand moment de musique -classique, cette fois : l'ouverture de Guillaume Tell, de Gioachino Rossini. Là encore, un emprunt grossier retravaillé avec des doigts d'ogre. On repense amèrement à Orange mécanique, de Stanley Kubrick, et à sa fabuleuse scène de partouze.

Je n'ai rien contre Hans Zimmer. Il est l'auteur de bandes originales inoubliables (True Romance, The Rock, Inception...). Même les accusations de plagiat qui pèsent sur lui (un exemple avec Inception) ne me dérangent pas outre-mesure. Daft Punk ne fait pas mieux, et cela ne nous empêche pas de nous déhancher sur leurs chansons. Mais son style ampoulé ne s'accorde pas avec toutes les mélodies. Hans Zimmer ose s'attaquer à des œuvres pleinement reconnues, cultissimes même, et les abaisse à des objets d'amusement vulgaires, jetables, au service d'un blockbuster sans âme. Plus rien n'est-il sacré à Hollywood ?

Crédit photo : AFP

Publié par Ariane Nicolas / Catégories : Actu